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Page:Pottier - Chants révolutionnaires.djvu/83

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TU NE SAIS DONC RIEN ?



À Henri Rochefort.


La mort a fait double saignée ;
Guerre civile, invasions,
Toute la nature indignée
Doit se tordre en convulsions.
J’ai soif de sa haine robuste,
Soif d’un chaos diluvien.
Eh quoi ! toujours ton calme auguste…
Ô forêt ! tu ne sais donc rien ?

Ô calme insensé, tu me navres !
Ramassés à pleins tombereaux,
J’ai vu piétiner des cadavres
Qu’auraient respectés des bourreaux.
La chaux vive et la tombe noire
Ne nous diront jamais combien !
Quoi, toujours le ciel en ta moire,
Flot rêveur, tu ne sais donc rien ?

Par milliers, pontons, lourdes grilles,
Vous gardez les vaincus maudits,
Ces gueux nourrissaient leurs familles
Ils étaient pères, ces bandits.
Loin d’eux leurs bébés, faces blanches,
Sont morts sans le pain quotidien.
Quoi ! toujours des nids dans tes branches,
Vieux chêne, tu ne sais donc rien ?

En nous lançant dans la fournaise,
Poète, artiste et travailleurs,