Page:Potvin - L'appel de la terre, 1919.djvu/105

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Et maintenant, sa mère était là devant lui et il pensait encore à la chère malade… sa mère qu’il avait oubliée comme les autres, comme Jeanne dont le souvenir flottait subitement devant ses yeux encore pleins de la vision du lit de fleurs reposait Blanche…

Sa mère !… Jeanne !…

C’est si horrible de ne plus se sentir protégé par rien, comme cela, tout-à-coup et brusquement de sentir s’envoler comme un voile dans une bourrasque la chère protection qui ne nous avait jamais fait défaut depuis le berceau : sa mère ! Non, c’est trop tôt ; sa mère, à lui, ne serait pas parmi les belles illusions qui s’en vont avec les vieilles lunes ; il réalisait qu’il avait encore sa mère ; il aurait encore recours à elle dans son embarras… Et Jeanne ? Elle vivait encore dans son souvenir ; elle pensait encore à lui et il le devinait dans les grands yeux pleins de détresse de sa mère ; Jeanne n’était donc pas morte pour lui… et les amours jurés près des vieux temples de nos campagnes, le soir, sous les étoiles, ne meurent pas…

Paul et sa mère causèrent longtemps comme deux bons amis qui se retrouvent.

On parla de tout ; des travaux à la ferme, des foins qui achevaient et qui avaient bien réussi, grâce au beau temps, des récoltes qui s’annonçaient bien, du jardinage qui avait un peu souffert de la sècheresse excepté les choux qui avaient belle apparence. Les bestiaux ne furent pas oubliés ; le père avait acheté au printemps deux bonnes vaches laitières qui donnaient beaucoup… La mère Duval s’étendit longtemps sur