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L’APPEL DE LA TERRE

blanche, propre et surmontée d’un toit pointu garni de lucarnes. C’est le père Duval qui l’a bâtie, il y a une vingtaine d’années, quand il est venu s’établir aux Bergeronnes après avoir vendu le demi-lot de terre qu’il possédait à la petite Rivière Saint-François, dans le comté de Charlevoix. Elle est bien à lui, cette maison, de même que la terre qui l’entoure…

Il a fait, durant dix ans, toutes les économies pour payer l’une et l’autre.

Il y a tout alentour de la bâtisse un jardin potager où il pousse des tourne-sols à côté des choux et des betteraves. Ce jardin-carpharnaüm est l’objet de toutes les sollicitudes de la mère Duval comme aussi de ses plus noirs soucis. Vingt fois le jour, en effet, il lui faut sortir et chasser, à coup de tout ce qui lui tombe sous la main, un bataillon de poules et de poulets, qui, après avoir traversé sans péril et partant sans gloire des clôtures obligeantes, viennent lâchement faire le sac des plates-bandes. Un énorme coq surtout est la bête noire de la mère Duval, bien que ce chanteclerc soit du plus brillant plumage. Aussi, il ne se passe pas de jour que la brave femme ne se promette de faire de cette tête de Turc à crête sanguinolente un ragoût pour le dimanche suivant.

Le rez-de-chaussée de la maison dont, du reste, tout l’intérieur n’a rien du Palais des Doges, se compose de deux pièces : la cuisine qui est aussi le salon, la salle de réception et la salle à manger, et la chambre des vieux qui renferme les garde-robes, le garde-manger, et, au besoin, le cellier. En haut, sous les combles, se