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XXII


La tempête ébranlait les vieux rochers du Saguenay.

Pendant deux jours presque, la neige était tombée sur la campagne, à flocons pressés et épais, couvrant tout d’un linceul immaculé… La belle chose que la neige qui tombe silencieusement, adoucissant de sa nappe virginale tous les contours brusques, mettant sa ouate sur les bruits de la campagne !… Le village semble se pelotonner et se faire petit, comme effrayé du silence énorme qui plane partout et qui rend formidable l’écho du moindre bruit ; les maisons, dispersées dans la campagne, paraissent comme au travers d’un rideau de tulle ; c’est mélancolique, étrange et mystérieux. Le temps est doux et toute cette neige est devenue « boulante », épaisse ; puis, tout-à-coup, le vent s’est élevé, par légères bouffées, d’abord, et ensuite, par rafales prolongées ; le rideau de tulle est mouvant ; les maisons qu’il laisse entrevoir dansent la sarabande dans des éclaircies ou bien disparaissent, quand la tulle devient plus opaque sous les poussées plus violentes du vent.

Sur la route de l’église des Bergeronnes, un jeune homme et une jeune fille s’avancent péniblement dans la neige qui n’est pas encore battue par les che-