Page:Potvin - L'appel de la terre, 1919.djvu/69

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

du huard… La plainte du bubonide monta d’abord vers le ciel puis, retombant tout à coup, elle alla frapper à toutes les saillies des deux géants de pierre ; elle s’éparpilla en mille modulations dans l’espace silencieux… puis, durant une minute, l’écho se promena d’anse en anse, roula de crète en crète, de rocher en rocher, descendit au fond des ravins, puis, remonta encore, s’affaiblissant toujours, s’arrêtant tout-à-coup, accentuant davantage le solennel silence.

M. Davis et sa fille étaient ravis.

Or, pendant que le maître d’école les voyaient tous trois perdus dans la muette admiration des deux géants, l’idée lui vint de faire un bout d’histoire du Saguenay. Il dit à ses amis la terreur que cette rivière inspirait autrefois aux voyageurs, aux blancs aventureux et aux indiens superstitieux ; il raconta les dangers des premiers navigateurs qui osèrent s’aventurer dans ces gorges ; puis, la popularité dont, une fois disparue la terreur qu’il inspirait, jouit, aujourd’hui, le fleuve aux « eaux profondes », et Paul ajouta :

« Ce cap qui s’élève au-dessus de nos têtes et dont vous apercevez les trois gigantesques échelons, comme toutes les merveilles de la nature, a aussi sa légende qui ne le cède en rien à celle des menhirs de la Bretagne.

— Vous la savez ?… interrogea vivement Blanche.

— On se la transmet, ici, de père en fils, dans nos familles et pour ma part, je n’ai eu garde de l’oublier, mademoiselle.