Page:Potvin - L'appel de la terre, 1919.djvu/84

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sa jeune vie, surtout le dernier chapitre du roman ébauché. À la douce figure de Jeanne qui lui apparut dans un lointain déjà imprécis, parmi la théorie des souvenirs déjà vieux, succéda la sémillante beauté de Blanche Davis. Il revivait la première rencontre avec celle-ci, puis les autres, les paroles banales, les causeries vagues. Il avait pourtant pris du plaisir à ces conversations ; il avait éprouvé de l’émotion à lui entendre dire certaines choses et il sentait maintenant que lorsqu’elle parlait elle emportait avec elle une partie de sa pensée et lui laissait en échange le souvenir très précis de ses gestes, de ses intonations, de ses regards, tout un trésor qu’il découvrait au fond de son cœur, comme une pierre précieuse que l’on a enfermée dans un coffret.

Chez Paul Duval, la cristallisation s’opérait.

À l’entour de l’image aimée la tendresse un peu confuse des premiers jours prenait corps.

Les brindilles secs des sapins sur le sol crissèrent sous des pas légers et Blanche parut dans le sentier ; elle s’avança vers le jeune homme. La jupe claire se dégageait des ombres touffues et sa beauté revêtait un aspect irréel, si étrangement émouvant que Paul demeura, un instant, immobile, n’ayant pas une parole pour exprimer son trouble et n’osant se lever tant il avait peur de faire s’évanouir l’apparition extraterrestre. Enfin, il s’approcha :

« Merci, dit-il, d’être venue… Vous rendez la pénombre plus belle.

Elle pencha un peu la tête vers lui ; mais elle n’au-