Page:Potvin - L'appel de la terre, 1919.djvu/98

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la brise cessa subitement de souffler ; un air chaud passa sur la surface de l’eau qui s’assombrit.

Paul Duval croyait que l’on aurait le temps de traverser la Baie et le Saguenay et de gagner les grèves de Tadoussac, en usant à la fois et de la voile et des rames. Mais la voile était inutile et quand Paul l’étendit aucun souffle ne vint la gonfler. On décida quand même de partir ; les trois hommes firent force de rames.

Un premier éclair traversa le ciel et un long grondement de tonnerre se fit entendre du fond de l’horizon. Un coup de vent subit fit frissonner l’eau de la baie devenue tout noire ; un second éclair crépita en même temps qu’un coup vif de la foudre. Des grondements sinistres sortaient des profondeurs du fleuve devenu houleux sous les coups de vent furieux qui l’assaillaient. Un troisième coup de tonnerre ébranla formidablement l’atmosphère ; ce fut comme le signal de la ruée des éléments. Les bois des collines environnantes semblèrent s’écraser sous la rafale ; l’eau de la baie poudrait comme, l’hiver, la neige dans une plaine. Bientôt on ne put voir quoi que ce fut sur les rives.

Dans la petite embarcation tout le monde frissonnait. Madame Davis était à demi morte de frayeur et Blanche, qui se tenait près de Paul, au gouvernail, se serrait avec terreur contre l’instituteur. Celui-ci tout en cherchant à manœuvrer l’embarcation dans la direction du vent, encourageait de son mieux ses compagnons atterrés. Bientôt, une épouvantable clameur remplit l’espace. Les vagues du fleuve arrivaient