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III

Vrai, si nos pères peinaient et nos mères aussi, nous, les jeunesses, qui étions encore trop faibles pour aider les parents aux travaux de la terre et des chantiers, en dehors de la classe, ne manquions pas d’amusements, l’hiver comme l’été. Pendant les neiges, nous allions dans le bois tendre des collets de fil de fer aux lièvres. Ce gibier-là, était en abondance à la Baie et, pendant tout l’hiver, nous nous en régalions à nos repas. Vous savez que c’est pendant l’hiver que le lièvre, quand il est tout blanc, est bon à manger. Le soir, après l’école, nous partions tendre nos collets et, le lendemain, dès le petit matin, nous allions à la levée. Ah ! les bonnes courses, sur nos petites raquettes montagnaises parmi les arbres chargés de neige ! Il avait neigé, souvent, dans la nuit, et nos traces de la veille étaient effacées ; n’importe, nous savions toujours retrouver nos collets tendus entre deux jeunes bouleaux, en travers d’une piste découverte, le jour d’auparavant. Rarement, nous avons manqué notre coup. À chaque collet tendu un lièvre était pris et, des fois, nous le trouvions encore vivant. Nous en rapportions, chaque matin, chacun cinq ou six. C’était à qui de nous en prendrait le plus. Nous en mangions pendant tout l’hiver et nos mères nous en servaient, aux repas, en « sea pie » ; au déjeuner, au dîner, au souper, à tel