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LE FRANÇAIS

neige, tout son corps étendu en travers du chemin de glace de la Baie-des-Pères…

L’on a vu comment, quelques heures après, il fut retrouvé par Jean-Baptiste Morel qui retournait au village avec sa charge de bois…


Léon Lambert fut longtemps malade et l’on pensa plusieurs fois qu’il allait mourir. Mais les soins maternels de Marguerite et les attentions de Jean-Baptiste Morel, et aussi sa forte et jeune constitution, eurent raison des coups de la maladie. Vers la fin d’avril, le médecin du village qui était venu souvent voir le jeune émigré, déclara qu’il était sauvé. Le printemps qui arriva très doux et plein de soleil acheva l’œuvre de résurrection.

Un matin de mai, Léon Lambert annonça à son bienfaiteur qu’il se sentait assez bien pour travailler et il lui demanda la permission de le quitter pour aller gagner de l’argent, quelque part sur une ferme, afin de s’acquitter envers lui, d’abord, et ensuite, se faire colon dans le pays, lui disant qu’il était venu pour cela, au prix de quelles souffrances, au Témiscamingue.

« Ah ! comme ça, tu veux cultiver la terre ? » lui demanda Jean-Baptiste Morel avec cette rondeur particulière aux habitants bas-canadiens à l’égard de tout étranger, « tu veux cultiver… De fait, tu m’parais bien pris, capable, c’est tout ce qu’il faut !… Mais tu t’plais donc pas chez nous ?… »

— Ah ! Monsieur Morel, « fit avec émotion le jeune Français », vous me faites injure. J’ai goûté chez vous