Page:Potvin - Le membre, 1916.djvu/75

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
76
LE « MEMBRE »

fait me font souvenir de la petite lumière qui brillera bientôt au sommet de la grande tour de la bâtisse du Parlement…

— …oui, les soirs l’on veut avertir la ville qui s’endort que ses gouvernants, eux, veillent… Tu as des idées originales. En effet, entre le grand œil brillant du phare, signal de l’écueil, et la petite lumière, révélatrice du travail des législateurs, l’analogie est frappante. Que la nuit soit claire ou sombre, le phare brille toujours de son éclat immuable pour tracer au navigateur la route qu’il doit suivre, et la petite lumière du Parlement brille, sans cesse de la même douce clarté, que la scène qui se passe à l’intérieur de l’édifice soit calme ou tumultueuse…

C’était vers la fin d’une après-midi d’arrière-automne et les deux amis, après une longue promenade dans la rue Saint-Jean, étaient venus se reposer sur un banc dans le petit parc Montmorency, tout au bord de l’abrupte falaise qui sera, suivant une prophétie, la première à tomber sur le dos des gens de la basse ville… Jamais les arbres ne sont plus beaux qu’à ce moment de l’année malgré qu’ils soient déjà frappés à mort par la saison mélancolique. Dans le petit parc, des lits épais de feuilles mortes s’étendent à leurs pieds ; c’est pourtant merveille de voir la fraîcheur des hêtres. Le roux, l’or et des restes de vert foncé font, dans leur chevelure, de jour en jour plus clairsemée, un agréable mélange… Les banlieues de Québec, du petit parc, en ce moment, sont ravissantes. Les deux jeunes gens ne cessent d’admirer la fine dentelure des hauteurs de Lévis et les collines à pente si douce des côtes de