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le tour du saguenay

Un calme délicieux baigne toutes choses, et les petites houles, autour du bateau, semblent se masser pour rouler ensemble par grandes ondes lentes et pacifiques. Quelques fois, malgré la trépidation du bateau, on dirait celui-ci immobile, n’osant avancer plus loin dans les méandres de ces sublimes montagnes ; la fuite incessante des rochers qui, l’un après l’autre, passe en défilé d’ombres silencieuses, nous indique que nous avançons… Nous avançons, en effet : les noires murailles de pierre s’écartent, s’abaissent, s’évanouissent en arrière de nous. Quelquefois, les monts verts sont riches d’essence capiteuse ; le plus souvent ils sont rigides, dénudés : peu ou point d’arbres, ou bien des petits sapins souffreteux, avec des contorsions d’infirmes et, çà et là, de rares taillis pareils à des témoins mélancoliques qui gémissent sur la désolation d’alentour.

Mais nous avançons, coupant la ligne d’ombre des grands monts, à intervalles réguliers, ou traversant des taches ensoleillées où les petites vagues brillent comme des fusées blanches… Nous avançons. Nous venons de passer la baie de la Rivière-aux-Outardes, sur la rive gauche : nous voyons aussi briller dans un vallon le clocher de l’église de Saint-Fulgence et les maisons du village qui se tassent alentour.

Nous venons de laisser le fond de cet entonnoir si savamment décrit par le regretté géologue, feu Mgr  J.-C. K.-Laflamme, qui fut chargé, un jour, par la Commission Géologique du Canada, de déterminer les limites du silurien inférieur du haut-Saguenay et qui a observé avec intelligence tous les détails orographiques de cette immense et sauvage région.

On sait que Arthur Buies et plusieurs géologues,