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le tour du saguenay

Le Cap Éternité est plus haut que son frère, le Trinité : ses flancs, perpendiculaires, du haut en bas, sont abrupts, parsemés de rochers en saillie ; son sommet est couronné d’une épaisse chevelure de sapins.

En face de ces deux caps, de l’autre côté de la rivière, par un contraste frappant dans ces lieux d’aspect si tourmenté, il y avait, naguère, un minuscule chantier de bois avec un petit moulin à bardeaux…

Et ceci nous rappelle cette aventure de Jean-Jacques Rousseau qui s’en était allé rêver, un jour, dans un lieu écarté et sauvage où il croyait bien être le premier être humain à parvenir là. Le célèbre philosophe rêvait tout à son aise quand il entendit, soudain, derrière un rideau épais de feuillage, le bruit d’un tic-tac régulier. Surpris, il s’avance derrière le massif de feuilles et il aperçoit, au milieu d’un champ… un moulin à carder la laine.

La petite baie Éternité est très profonde et n’importe quel navire peut y mouiller en parfaite sécurité. Au fond de cette baie, l’on ne voit pas le Saguenay et l’on se croirait au bord d’un lac entouré de hautes montagnes.

Nous ne pouvons pas quitter le Cap Trinité sans rappeler les beaux vers écrits à son sujet par Charles Gill, poète et peintre canadien-français, l’une des victimes de l’épidémie de grippe espagnole en 1918, décédé à Montréal, au mois d’octobre de cette année terrible. Charles Gill avait commencé un poème qui devait comprendre trente-deux chants et qui était intitulé Le Cap-Éternité. Ce poème est inachevé ; il ne compte que douze chants et quelques bribes des autres. Son chant sur le Cap-Éternité est de toute beauté :