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Puyjalon

On le voit, Henry de Puyjalon s’intéressait à tout ce qui, sur la Côte Nord, respirait dans les bois, à tout ce qui nageait dans cette partie méandreuse du fleuve, à tout ce qui volait ou nichait aux flancs des îlots rocheux du littoral. Il a remonté toutes les rivières de la côte ; il a visité toutes les îles et tous les îlots ; il a pénétré dans toutes les anses et dans toutes les baies, même les plus redoutées, les plus mystérieuses, comme cette Baie des Trépassés où son engagé Thomas, une nuit, aperçut la « barge à Johnny » perchée au flanc moussu d’un morne solitaire… Et partout, Henry de Puyjalon a étudié poissons, animaux à fourrure, bêtes à pelleterie, gibier de mer et de grève, échassiers et palmipèdes, notant avec conscience leurs habitudes, leur caractère distinctif, leurs habitats, et suggérant les plus sûrs moyens de conserver les uns et les autres. Il n’était pas une espèce sur terre et sur mer qui lui fut indifférente, malgré qu’il eut ses préférences, comme sa visible prédilection pour le canard eider.

Et comme il a déploré, avec des accents tantôt indignés, parfois touchants, les moyens destructifs, voire barbares, que l’on employait contre ses protégés de l’air, de l’eau et de la forêt !

Entendons-le, par exemple, déplorer la disparition de « cet animal exquis, à la chair savoureuse, aux couleurs chatoyantes » qu’est le maquereau :

« Autrefois », dit-il, « nous étions riches en maquereau. Il a disparu. Les pêcheurs américains l’ont chassé de partout. Nous ne le voyons plus pénétrer dans nos baies en troupes immenses. Les parages qu’il affectionnait sont déserts.