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Puyjalon

demain matin. Un mois après, un chasseur, passant par le campement de Puyjalon, lui remit une lettre de sa femme, et il devina alors pourquoi, cette nuit de tempête, il avait reçu la visite de « son curé ».

Dans le monde civilisé, on avait rapporté Henry de Puyjalon seul dans la forêt, gravement blessé, sans nourriture, mourant : et alors, « son curé », sans « outil que sa hache », sans nourriture, seul, s’était mis en route, par cette affreuse tempête, jouant sa vie, pour aller secourir son ami et son… paroissien. Et il était reparti sans rien lui dire du dévouement qui l’avait amené jusqu’à lui.

« Quelquefois », écrit de Puyjalon, « je pense à lui quand la neige tombe et que le vent plie la tige des arbres ; et mes yeux deviennent humides ».

Le 5 mai 1894, un des amis d’Henry de Puyjalon, Léon Ledieu, écrivait dans le « Monde Illustré » :

« J’ai un ami. Cet ami, j’ai eu l’occasion de vous en parler déjà, à mon grand regret il est vrai, mais on n’est pas maître de rien en ce monde, pas même de ses amitiés.

« Quoi qu’il en soit, Puyjalon part ! part pour le Labrador !

« C’est l’état normal de ce brave garçon, ainsi que chacun sait, de gagner chaque année cette région, absolument dédaignée jusqu’ici, que l’on appelle le Labrador canadien.

« Je l’ai bien dit, dédaignée, et cependant rien de plus injuste que cette épithète appliquée à ce pays.

« Si l’on en croit les sources nouvelles qui sourdent à chaque instant, cette terre méprisée est digne de tout