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ne ville. Irréguliers et fantaisistes, ils prennent le temps comme il se présente et travaillent quand l’idée leur en vient. Un jour, il suffira à l’un d’entre eux d’avoir gagné quelques sous avant midi ; estimant alors qu’il a assez travaillé, il va s’étendre au soleil sur un tas de sable, de charbon ou de ballots de marchandises, et il dormira à poings fermés ; ou bien, allongé sur le dos, il causera avec un compagnon à mots longuement espacés.

Quand le travail sera abondant, faudra-t-il donner un bon coup de collier ? on peut compter sur tous les débardeurs. Ils y seront tous et travailleront ferme. Mais gare aux suites. Durant des jours entiers, les produits de leur travail s’engouffrent dans les cabarets des environs qui deviennent le théâtre d’effroyables bombances. Sous la pluie et en plein soleil, le métier est rude et donne soif…

Chaque matin, quand arrive la troupe des débardeurs, un bon tiers manque de ceux qui ont travaillé la veille : les uns sont malades, les autres font ripaille, d’autres enfin, ne se soucient pas de travailler.

Alors on embauche ceux qui s’offrent à les remplacer. On prend tous ceux qui se présentent et c’est ce qui donne ce caractère hétéroclite à cette société mêlée. Beaucoup sont des malheureux venus de leur province, sans métier, sans amis ; des jeunes gens qui ont