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On avait peut-être raison.

Car il n’y a pas encore bien longtemps, tout ce magnifique pays n’était qu’une contrée sauvage, couverte de mystérieuses forêts où, presque seuls, parmi les blancs, les missionnaires avaient osé pénétrer… Un pays de légendes que l’on se racontait avec terreur, le soir, à la veillée.

Alors, on appelait le beau Saguenay, le « Fleuve de la Mort »… C’était une sombre rivière qui coulait dans un gouffre profond, taillé en pleines montagnes, au milieu de fantastiques rochers. Les premiers voyageurs blancs que Champlain y avait envoyés, la remontèrent avec des frémissements et une sorte d’épouvante. Et l’âme de nos superstitieux sauvages, accoutumés pourtant à ces délires de la nature, mais qui s’effrayaient souvent d’une roche, d’un arbre de forme un peu bizarre, s’emplit d’une soudaine terreur à la vue de ces entassements informes, de ces chaos immobilisés et de ces gigantesques crevasses. Ils sentirent sans doute passer la mort au-dessus de leur tête et se recommandèrent au manitou des voyageurs…

Certes il n’en est plus ainsi du « Fleuve de la Mort », du Saguenay, “the far famed Saguenay”, que le touriste, de bien loin, vient contempler aujourd’hui.

Autrefois on se racontait avec effroi les