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qu’après avoir monté un long escalier, j’arrivais en haut d’une tour qui dominait Moscou. En bas, j’apercevais le peuple comme une fourmilière. Du doigt les passants me montraient en se moquant de moi, et je me sentais saisi de honte et d’épouvante, je tombais en bas de la tour et je me réveillais. Trois fois de suite, ce rêve se répéta. Est-ce assez étrange ?

PIMÈNE

Ton jeune sang bouillonne ; il faut le dompter par des prières, des jeûnes ; tes rêves seront alors toujours tranquilles et doux. Moi-même, à mon âge, si je ne fais le soir une longue prière avant de m’endormir, mes rêves de la nuit sont impurs et agités ; je vois soit de riches festins, soit des camps de guerriers, des batailles sanglantes, soit toutes les folies de ma jeunesse enfuie.

GRÉGORI

Quelle jeunesse heureuse tu vécus ! Tu te battis aux tours de Kazan, tu refoulas l’armée lithuanienne sous le commandement de Chouïsky, tu connus la cour pompeuse du tsar Ivan ! Quel bonheur fut le tien ! Et moi, depuis l’enfance, je fus un pauvre moine errant par les cellules ! Pourquoi ne pourrais-je