Page:Pouchkine - Eugène Onéguine, trad. Paul Béesau, 1868.djvu/117

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l’épigramme est prête à jaillir de ma plume, — et pourtant, pauvre poète, il faut que tu écrives un sonnet ou un madrigal !


Lensky n’écrit pas de madrigaux sur l’album de son amie. Sa plume ne distille pas les froides saillies de la galanterie : elle parle d’amour, elle ne s’inspire que d’Olga, de ses paroles, de ses grâces. Sa poésie élégiaque n’emprunte qu’à la réalité ses touchants tableaux, et coule abondante comme l’eau d’une source. Tu ne fais pas autrement, Yasikoff, toi dont les chants n’ont de fictif que le nom, et qui pourrais reconstruire avec tes élégies l’histoire de ta vie entière.


Mais, silence ! N’entends-tu pas le sévère critique qui ordonne de jeter loin de nous la pâle couronne de l’élégie, et crie aux poètes : « Cessez donc de toujours pleurer, de répéter sans cesse la même chose, de vous répandre en regrets sur le passé ! Nous avons assez de tout cela ; changez de sujet et de style.

— Ami, tu as raison, et je te vois d’ici nous montrer la trompette, le masque et le poignard, et le meurtre de la pensée ! Tu ne veux plus qu’on