Page:Pouchkine - Eugène Onéguine, trad. Paul Béesau, 1868.djvu/184

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il se couche en tapis blancs sur les plaines, autour des collines ; il réunit par une nappe solide de glace les deux rives du fleuve. La gelée étincelle, et nous prenons part à tous les plaisirs que cette dure saison nous apporte. Mais Tatiana est triste ; elle ne va pas, suivant la coutume des jeunes filles, souhaiter la bienvenue à l’hiver, elle ne va pas respirer le premier vent qui a passé sur la glace, ni se laver le visage, les épaules et les seins avec la neige des toits. Cette année, Tatiana redoute ce que l’hiver doit lui apporter.


Le jour du départ, fixé depuis longtemps, est enfin venu. On amène la voiture de voyage, oubliée dans la remise, on la nettoie, on la recouvre à neuf ; puis, trois charrettes transportent les meubles : effets, fauteuils, coffres, confitures en bocaux, matelas, lits de plume, cage avec des coqs, bassin de cuivre, pots en terre, etc. Les gens crient, se disent adieu en pleurant. On conduit dans la cour dix-huit haridelles, qui, de suite, sont attelées au vosok[1] seigneurial.

  1. Voiture de voyage.