Mais aujourd’hui nos chemins sont affreux ; les
ponts pourrissent oubliés ; dans les stations, les
insectes et la vermine empêchent le voyageur fatigué
de prendre une minute de repos. Des vivres,
il n’y en a pas ; et si, dans l’isba[1] glacée, quelque
apparence satisfait d’abord, on y endure bientôt
la faim : un prix-courant, suspendu seulement pour
les yeux, excite l’appétit du voyageur, pendant que
les cyclopes du village battent l’enclume et raccommodent
votre voiture, fragile ouvrage de l’Europe,
en bénissant les ornières et les fossés de leur
pays.
Toutefois il y a une compensation : pendant l’hiver, le voyage est agréable et facile, la route est unie comme le vers sans pensée d’une romance à la mode. Nos automédons sont habiles, nos chevaux infatigables, et les verstes passent devant les yeux comme les barreaux d’une grille. Mais madame Larine, craignant les frais de poste, voyageait avec ses propres chevaux et resta en route sept jours et sept nuits. Tatiana put donc jouir pleinement de l’ennui du voyage.
- ↑ Maison du paysan.