Page:Pouchkine - Eugène Onéguine, trad. Paul Béesau, 1868.djvu/77

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monument qui recouvre ses restes, on lit ces mots :

LE BRIGADIER DMITRI LARINE,
HUMBLE PÉCHEUR,
SERVITEUR DE DIEU,
REPOSE EN PAIX SOUS CETTE PIERRE.


De retour dans ses terres, Wladimir Lensky alla visiter l’humble tombeau de son voisin, donna un regret à sa cendre et resta longtemps en proie à la tristesse.

« Poor Yorick ![1] murmura-t-il ; il m’a tenu dans ses bras ! Que de fois, dans mon enfance, je jouai avec sa médaille d’Otchakoff ! Il me destinait Olga, et disait : Verrai-je jusqu’à ce jour ? » — Et Wladimir épanchait sa douleur dans quelques strophes à la mémoire de son vieil ami,


et consacrait aux cendres patriarcales de son père et de sa mère une plaintive élégie. — Hélas ! la loi mystérieuse du destin veut que, dans les champs de la vie, les générations des hommes, comme des moissons éphémères, naissent, mûrissent et tombent ; d’autres prennent leur place… L’espèce variable et folle des humains croît, s’agite, bouil-

  1. Exclamation d’Hamlet à la vue du crâne du fou.