Page:Pouchkine - Eugène Onéguine, trad. Paul Béesau, 1868.djvu/94

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m’occuper de la lettre de ma belle héroïne. J’ai donné ma parole de vous en entretenir, mais j’avoue que j’ai grande envie de la reprendre, car je sais trop bien que la plume du tendre Parny n’est plus à la mode de nos jours.


[1] Chantre des festins et des soucis amoureux, si du moins tu étais près de moi, Baratinski, je t’adresserais une requête. Je te prierais de transporter sur ton luth magique les paroles étrangères d’une jeune fille en proie à une fatale passion. Où donc es-tu, poète ? Viens : je te cède mes droits avec bonheur. Mais ton âme n’est plus habituée à la louange, elle est errante et solitaire sous le ciel de Finlande, au milieu des rochers grisâtres, et tu n’entends point mon appel !


La lettre de Tatiana est sous mes yeux. Je la conserve pieusement. Elle me cause toujours un trouble secret, et pourtant je ne puis me lasser de la lire. Qui donc lui inspira cette tendresse, cette charmante simplicité ? Qui lui révéla ces rêves

  1. Pour comprendre cette strophe, il faut se rappeler ce que le poète a dit plus haut, c’est à dire que Tatiana avait écrit sa lettre en français.