mes armes ont été heureuses. Attends, attends, tu en verras bien d’autres quand je marcherai sur Moscou.
– Et tu comptes marcher sur Moscou ? »
L’usurpateur se mit à réfléchir ; puis il dit à demi-voix : « Dieu sait, … ma rue est étroite, … j’ai peu de volonté, … mes garçons ne m’obéissent pas, … ce sont des pillards, … il me faut dresser l’oreille… Au premier revers ils sauveront leurs cous avec ma tête.
– Eh bien, dis-je à Pougatcheff, ne vaudrait-il pas mieux les abandonner toi-même avant qu’il ne soit trop tard, et avoir recours à la clémence de l’impératrice ? »
Pougatcheff sourit amèrement : « Non, dit-il, le temps du repentir est passé ; on ne me fera pas grâce ; je continuerai comme j’ai commencé. Qui sait ?… Peut-être !… Grichka Otrépieff a bien été tsar à Moscou.
– Mais sais-tu comment il a fini ? On l’a jeté par une fenêtre, on l’a massacré, on l’a brûlé, on a chargé un canon de sa cendre et on l’a dispersée à tous les vents. »
Le Tatar se mit à fredonner une chanson plaintive ; Savéliitch, tout endormi, vacillait de côté et d’autre. Notre kibitka glissait rapidement sur le chemin d’hiver… Tout à coup j’aperçus un petit village bien connu de mes yeux, avec une palissade et un clocher sur la rive escarpée du Iaïk. Un quart d’heure après, nous entrions dans la forteresse de Bélogorsk.