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comment elles ont été faites
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La lecture de ces dispositions rend tout commentaire superflu. Le Cabinet où siégeaient, à côté de M. Guérin, MM. Charles Dupuy, Félix Faure, Barthou, Poincaré, Hanotaux, Georges Leygues, etc., pouvait se vanter d’avoir laissé du premier coup derrière lui les textes les plus fameux du second Empire. La loi de Sûreté générale à laquelle M. Guérin avait fait d’ailleurs quelques emprunts heureux, restait par comparaison, incomplète, timide, et presque pudique.

Contre les anarchistes, l’émotion du moment eût pu faire comprendre les excès absurdes de cette loi. Mais, dans la pensée du gouvernement, elle ne visait pas seulement les anarchistes. Elle était une loi de terreur contre tous ses adversaires politiques. Les ministres l’ont nié. Préfèrent-ils qu’on montre leur grossière ignorance ou leur criminelle mauvaise foi ? Peu nous importe d’ailleurs leurs protestations ; nous n’avons qu’une chose à juger, le texte présenté par eux. Qu’on en juge : L’article 1er qui renvoyait à la juridiction correctionnelle, et l’article qui punissait de la relégation les délits prévus par les articles 24 et 25 de la loi sur la presse, négligeaient complètement de spécifier — comme le fit plus tard l’amendement Bourgeois — que l’effet de ces nouvelles dispositions serait limité aux actes de propagande anarchiste. Or, les articles 24 et 25 comprennent presque tous les délits de presse : l’article 24, § 2, en particulier, concerne la provocation aux crimes contre la sûreté intérieure de l’État, c’est-à-dire les délits politiques par excellence. Il suit de là que, si la Chambre avait adopté dans sa teneur le projet du gouvernement, la France se serait réveillée avec une loi qui, sous couleur de réprimer les menées anarchistes, permettait de

    puni d’un emprisonnement de trois mois à deux ans et d’une amende de 100 à 2.000 francs.
    Art. 3. — La peine de la relégation pourra, en outre, être prononcée contre les individus condamnés en vertu de la présente loi.
    Art. 4. — Les individus condamnés en vertu de la présente loi sont soumis à l’emprisonnement individuel, sans qu’il puisse résulter de cette mesure une diminution de la durée de la peine.
    Art. 5. — Dans les cas prévus par la présente loi et dans tous ceux où le fait incriminé aura un caractère anarchiste, les cours et tribunaux pourront interdire, en tout ou en partie, la reproduction des débats.

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