Aller au contenu

Page:Pouget-Les Lois Scélérates de 1893-1894 - 1899.djvu/25

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
comment elles ont été faites
17

sif de moyens quelconques. Elle le remplaça par ces mots qui ne sont pas beaucoup plus précis : provocation et apologie. Enfin, la Chambre, sur l’intervention de M. Bourgeois, devait limiter l’application de l’article 1er aux actes de propagande anarchiste. Mais la loi restait hypocrite et atroce, et on allait en confier l’application à ce ministère qui l’avait voulue plus atroce encore et plus hypocrite. Les orateurs de l’opposition qui se succédèrent à la tribune sans trouver de contradicteurs. MM. Brisson, Goblet, Denys Cochin, de Ramel, Millerand, montrèrent au surplus qu’elle était inutile, qu’on ne pouvait concevoir aucun délit anarchiste que les lois de 93 ne pussent réprimer, et qu’elle restait inintelligible et absurde à moins qu’elle ne fût dirigée contre la presse. On vint dire aux ministres de la République que la Restauration et l’Ordre Moral, dans des temps plus troublés que ceux-là, n’avaient pas craint de laisser au jury les délits de presse, que la juridiction correctionnelle n’était pas plus rapide que la cour d’assises, que même elle l’était moins puisqu’on pouvait y multiplier les incidents et les exceptions de procédure, que le jury s’était montré aussi résolu contre les anarchistes que les juges, que le courage accidentel était moins rare que le courage professionnel. Aucun député ne répondit ; le gouvernement et la commission répondirent peu de chose. On vit M. Guérin, dans le même discours, à quatre lignes d’intervalle, affirmer successivement que les crimes anarchistes n’étaient jamais le fruit d’une entente et que le parti anarchiste était puissamment organisé. Il restait coi devant une objection de M. Brisson et suppléait à ce silence par une dissertation d’une demi-colonne insérée après coup au Journal Officiel du lendemain. Quand il se trouvait embarrassé, il recourait à l’éternel procédé des Raynal et des Dubost, il lisait des journaux ou des placards anarchistes. Plus de discussion, des citations. Quant au rapporteur Lasserre, il n’avait qu’un argument, et il le multiplia. La loi proposée n’étant pas une loi d’exception puisqu’on rendait les délits de presse au juge de droit commun des délits, au juge correctionnel. Misérable calembour juridique dont il a été fait cent fois justice ! D’après le