Page:Pouget-Les Lois Scélérates de 1893-1894 - 1899.djvu/46

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
38
les lois scélérates de 1893–1894

tion[1]. Pourquoi la relégation ? Quand il fut frappé, trois semaines ne s’étaient pas écoulées depuis la promulgation de la loi de juillet stipulant que, pour délits anarchistes, tout condamné à plus d’un an de prison serait reléguable à une deuxième condamnation. Donc, quoique Monod eût à son actif une peine antérieure, régulièrement la loi nouvelle ne pouvait l’atteindre.

Jusqu’ici nous n’avons vu incriminer d’affiliation à une association de malfaiteurs que des propagandistes, ou des gens tenus pour tels. Ce crime de désirer un avenir meilleur, ceux-là l’ont payé du bagne.

Mais, que dire du verdict rendu par la Cour d’assises de Laon, le 15 novembre 1894 ? Là, au lieu de militants, les victimes furent deux malheureux diables, pris dans l’engrenage de la misère et ballottés, dès leur jeune âge, de prison en asile de nuit.

Le 13 juillet 1894, à 7 heures du matin, le commissaire spécial de police remarquait à la gare de Laon un gueux « d’allures suspectes », nu-pieds, misérablement vêtu. Interpellé, il déclara se nommer Lardaux, 21 ans, sorti la veille de la prison de Laon. On l’arrêta et, en le fouillant, on découvrit ce qui lui donnait « l’allure suspecte ».


Il fut trouvé porteur, dit l’acte d’accusation, de différents papiers parmi lesquels on découvrit une sorte d’alphabet de convention, dit alphabet islandais, et une enveloppe de lettre sur laquelle étaient inscrites différentes indications paraissant se rapporter à des formules chimiques. Un premier examen de ces formules, opéré par le Directeur de la Station agronomique de l’Aisne, ne laissa aucun doute sur leur nature, et on acquit la certitude qu’on avait entre les mains une formule d’explosifs.


Découverte précieuse ! L’imagination des policiers chevaucha : évidemment, ils tenaient le fil d’un vaste complot. Sans tarder, les détenus de la prison de Laon furent fouillés et sur l’un, Vautier, on trouva les objets suivants :


Un carnet contenant des pièces de vers, des adresses, des chansons anar-

  1. M. Vidal de Saint-Urbain, qui, dans ce procès, remplit les fonctions du ministère public, a été élu député de Milhau (Aveyron), aux dernières élections.