Page:Pouget - Le sabotage, 1911.djvu/14

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demandes, eh bien, nous pouvons mettre en pratique le Go Canny — la tactique de travaillons à la douce, en attendant qu’on nous écoute. »

Voilà clairement défini le Go Canny, le sabotage : à mauvaise paye, mauvais travail.

Cette ligne de conduite, employée par nos camarades anglais, nous la croyons applicable en France, car notre situation sociale est identique à celle de nos frères d’Angleterre.

Il nous reste à définir sous quelles formes doit se pratiquer le sabotage.

Nous savons tous que l’exploiteur choisit habituellement pour augmenter notre servitude le moment où il est le plus difficile de résister à ses empiètements par la grève partielle, seul moyen employé jusqu’à ce jour.

Pris dans l’engrenage, faute de pouvoir se mettre en grève, les travailleurs frappés subissent les exigences nouvelles du capitaliste.

Avec le sabotage, il en est tout autrement : les travailleurs peuvent résister ; ils ne sont plus à la merci complète du capital ; ils ne sont plus la chair molle que le maître pétrit à sa guise : ils ont un moyen d’affirmer leur virilité et de prouver à l’oppresseur qu’ils sont des hommes.

D’ailleurs, le sabotage n’est pas aussi nouveau qu’il le paraît : depuis toujours les travailleurs l’ont pratiqué individuellement, quoique sans méthode. D’instinct, ils ont toujours ralenti leur production quand le patron a augmenté ses exigences ; sans s’en rendre clairement compte, ils ont appliqué la formule : à mauvaise paye, mauvais travail.

Et l’on peut dire que dans certaines industries où le travail aux pièces s’est substitué au travail à la journée, une des causes de cette substitution a été le sabotage, qui consistait alors à fournir par jour la moindre quantité de travail possible.