Aller au contenu

Page:Pougy - Idylle saphique, 1901.djvu/133

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
123
IDYLLE SAPHIQUE

main. Elle s’excusa aussitôt de sa hardiesse, mais elle ne pouvait manquer une telle occasion : C’était — et elle parlait doucement, mystérieusement, chuchotant presque comme si elle se fût trouvée dans une église, c’était un étranger, très riche et follement épris de madame de Lys. Un jour il l’avait vue passer au Bois et il l’avait suivie ; depuis il en rêvait, il la voulait à tout prix ; ne connaissant personne qui pût le présenter il était venu chez elle, lui demander son aide. Elle savait combien l’accès était difficile auprès de madame, alors — elle était franche — elle avait tenté d’abord de le dissuader, lui en proposant d’autres, bien jolies aussi et plus aisément corruptibles… Il n’avait rien voulu entendre. C’était Annhine de Lys qu’il voulait. Oh ! elle comprenait bien ça maintenant qu’il lui était permis d’admirer madame de près. Écoutez, avait-elle dit en fin de compte, je ne vous promets rien de certain, mais je vais risquer le tout pour le tout et j’irai la trouver. Mais que lui donnerez-vous ? — Ce qu’elle voudra, allez jusqu’à vingt-cinq mille francs…

Tesse eut une lueur de joie :

— Ça, c’est une veine, ma Nhine !

— Est-ce bien sûr ?… demanda Nhine qui se défiait.

— Madame, c’est comme je vous le dis, cet homme est fou… il devenait tout pâle en parlant de vous. Je vous l’avoue, j’ai essayé par mille moyens de changer son idée, rien n’y a fait. Je n’osais pas venir, sa-