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Page:Pougy - Idylle saphique, 1901.djvu/166

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IDYLLE SAPHIQUE

fait. — Ah ! s’exclama la traîtresse, j’ai égaré mon mouchoir… Baronne… soyez exquise… Voulez-vous me prêter le vôtre, tandis que l’on ira nous en quérir d’autres ?… — Et comme l’innocente baronne cherchait obligeamment : — Inutile ! fit-elle, méprisante, j’ai vu clair déjà dans votre jeu ! Votre mouchoir se trouve dans la culotte de Monsieur !… — Elle me désignait ! Je compris toute l’astuce et la perfidie de mon ingrate amie. Stupéfaction de la malheureuse ! Bref, il s’ensuivit un duel avec Grandlieu, je fus blessé, bafoué et je perdis ma belle. Depuis, je m’entoure de jolies servantes que je regarde et qui veulent me plaire, mais je maudis l’amour ! Savez-vous ce que j’aime, l’abbé ? Voulez-vous le savoir ?…

Et Flossie se fit un porte-voix de ses petites mains pour crier à Nhine, amusée et attentive :

— Eh bien ! j’aime mon sexe, et mes beaux petits pages !

— Est-tu drôle, Moon-Beam ! Es-tu drôle ! Où vas-tu chercher tout cela ?

— Dans mon amour pour toi, qui veut te distraire. — Oui… elle refit sa voix de paillard… oui, l’abbé ! c’est charmant, je me venge sur la bête, et je m’en trouve bien. Ah ! que le monde finirait d’une propre façon et de nette manière si tous étaient ainsi que moi !

Scandalisé, l’abbé détournait la tête :

— Vous m’offusquez, marquis.

— Morbleu ! tu ne crains rien, l’abbé ! Bois !