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Page:Pougy - Idylle saphique, 1901.djvu/233

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IDYLLE SAPHIQUE

— Volontiers, car c’est un homme exquis, monsieur de Gastier, il a un talent énorme, et de plus c’est un homme du monde, un charmeur. Il a quitté Paris, car sa mère était très malade de la poitrine et il est venu se fixer ici afin de lui conserver l’existence le plus longtemps possible. Une grande finesse de cœur et de sentiment. Il possède ce beau château qu’on voit d’ici, voyez-vous ? Il vous sera d’une grande ressource. Dès maintenant je vais lui parler de vous, le prévenir…

Il sortit de sa poche un portefeuille sombre, chiffré d’or et chercha une de ses cartes, y inscrivit son adresse, y ajoutant derrière le nom du docteur, puis il la tendit à Annhine. Ces légers efforts lui firent monter le rouge au visage. Lorsqu’il se fut éloigné :

— C’est Régis, un gentil garçon, tout jeune, très riche, il a été longtemps l’amant de la belle madame Trakir.

— Ah ! oui, je me souviens, fit Tesse.

— Le pauvre, dans quel état je le retrouve !… C’est un ami d’Henri. Tu ne l’as jamais vu chez moi, car il se consacrait tout au caprice de sa Dame ; c’est un cérébral, un nerveux, elle l’a épuisé, tout simplement. Henri m’avait un peu conté la chose ! Je le reconnaissais à peine. Comme il t’a regardée ! Il doit l’aimer toujours, tu lui ressembles vaguement, à la belle Trakir.

— Il m’intéresse, ce Régis, répondit Tesse. Je ne savais rien de tout cela et je l’aurais deviné. Mais il