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Page:Pougy - Idylle saphique, 1901.djvu/338

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IDYLLE SAPHIQUE

Elle se prosterna machinalement aux pieds de la morte… oui… oui… Nhinon était morte… c’était ça !… Ah ! il fallait bien qu’elle fût morte pour qu’on ait ainsi saintement croisé ses bras et fermé ses yeux dont les paupières lourdes ne filtraient plus aucune lueur. Une indignation s’empara d’elle, elle ne put ni pleurer ni prier… elle ne voulait pas… elle ne voulait pas… quelque chose se tordit en elle, elle se releva, très vite, désirant fuir… elle ne distinguait plus rien ni personne ; seule, la vision de Nhine, vertigineuse, lointaine, la vision de Nhine reposant dans des fleurs, sa petite tête pâle posée sur les coussins, inerte, exsangue, jolie comme si elle dormait en un soulagement de souffrance qui apaisait ses traits calmes, apurés… la religieuse piété de ses mains jointes…

Figée par la sensation aiguë de sa douleur, elle croyait marcher dans le vide et se heurta contre Altesse qui ne la reconnut pas, Altesse, les yeux rouges, qui se mouchait très fort et pleurait à chaudes larmes, parmi tous les gens qui emplissaient la chambre.

Ah ! maintenant, elle distinguait tout. Du pas raidi des automates elle cherchait une issue, ne trouvant pas la porte, car on venait sans cesse. On apportait des fleurs… beaucoup de fleurs ; on donnait des ordres à des domestiques, on percevait des sonneries de téléphone.

Brusquement elle se trouva dehors, sous le jour cru… elle entendit un journaliste qui demandait des détails et les transcrivait sur son bloc-notes. Horri-