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Page:Pougy - Idylle saphique, 1901.djvu/52

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IDYLLE SAPHIQUE

tiédeur se mêle, vois, croisons nos mains, puis ta bouche, tes dents, nos cils… c’est gentil ! Nos nez, comme les Chinois… Lâche-moi maintenant, pas plus… je te le défends… non, non, Flossie, va-t’en !

Et elle lui échappa, la rejetant loin et mettant entre elles comme défense la largeur de la table.

— Tu me feras mourir ! Nhine, tu me rends folle.

— Va maintenant, mon page ! Les devoirs de mon métier m’appellent et ton fiancé t’attend. Rhabille-toi… je dois aller au bois.

— J’irai aussi, afin de t’apercevoir… Et quand te reverrai-je en ces jolis lieux qui te gardent ?

— Eh bien, demain, Dimanche. C’est un jour où je suis relativement libre. Si tu veux, je prendrai une loge quelque part et nous irons au théâtre en matinée ainsi que les petits enfants. Une loge pour nous distraire aux Folies ou plutôt frissonner chez Sarah, à Hamlet, c’est un des derniers jours où on le joue.

— Laisse, Nhine, laisse Willy te l’envoyer, veux-tu ?

— En ton nom ? Je veux bien… mais qu’il n’y vienne pas… Il aura le seul droit de nous contempler de loin, je n’ai pas le désir de le connaître, il a l’air d’un clergyman… et il t’est nécessaire. J’ai une répulsion pour les choses utiles. Dis-le lui… non, pas ça, mais pour demain. Tu sais, aux matinées, il n’y a presque personne de connu, ça ne pourra pas te compromettre d’y venir avec moi. Déjà prête ? Au revoir, mon page, tu me plais, j’adore tes cheveux et la tournure de ton esprit !