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Page:Pougy - Idylle saphique, 1901.djvu/53

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IDYLLE SAPHIQUE

— Ta voix m’affole, Annhine, elle est douce, prenante, elle résonne ainsi qu’une tendre musique… Elle est si jolie, ta lente voix, ma Nhine !

— La tienne est gentille, très douce aussi et son léger accent lui donne un charme de plus. Nous allons bien ensemble… Dis-moi, Moon-Beam, une toute petite chose : As-tu du cœur ?

— Ne cherchez plus mon cœur, les bêtes l’ont mangé[1].

— Déjà ! En tous cas, à défaut de cœur tu as de l’esprit d’à-propos, de l’instruction, de la mémoire et tu connais Baudelaire ! Je l’adore, mais il m’a fait du mal. Décidément tu me plais fort, petite Miss ! Au revoir, monstre ! Tu es gentille de vouloir me distraire, vois, ma méchante humeur s’est évaporée à ton contact. À demain, viens me prendre ici vers deux heures, exactement…

— Bien, Tyrannique… et puis à tout à l’heure, au Bois, car tu as promis de venir charmer les dernières feuilles d’automne ainsi que ta Flossie ?

— Oui… entendu… au revoir.

 

— Très drôle cette petite, peu banale, amusante… si cette aventure ne se complique de rien, ce me sera un passe-temps charmant, songeait Nhine en se laissant coiffer et habiller. Voilà enfin quelque chose dans ma vie ! Un amour platonique de vierge, car je

  1. Baudelaire.