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Page:Pougy - Idylle saphique, 1901.djvu/70

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IDYLLE SAPHIQUE

— Et c’est pour cela… pour cela que Will est jaloux ! Les autres, en excitation ou par curiosité, se livraient de suite à mes caresses… répondaient à mes transports, m’illusionnaient d’amour ! Toi, tu te fais désirer, tu m’exaspères, tu m’affoles… et tu lui refuses ta porte !

— Manquerait plus que ça, bougonna Nhine renfrognée, en se rejetant maussadement en arrière. Oh ! non alors ! Je n’ai jamais aimé de femmes, moi, et si jamais… si jamais ça m’arrivait, eh bien, d’abord je ne sais pas si ça serait avec toi, et puis en tous cas, pas de regards indiscrets, c’est vilain ça, c’est débauché, ignoble ! C’est sale, on appelle ça chez nous une partie à trois ou encore d’un autre nom très laid que je ne veux pas prononcer !

— Oh ! je sais… des voyeurs… et Flossie articula gentiment, sans honte ni trouble, avec son délicieux petit accent d’outre-mer, ce mot canaille.

— Oh ! Miss, vous me scandalisez !… Et Nhine prit une mine confite, puis elle pouffa de rire. Alors Will m’en veut de ce que je ne veux pas lui offrir un petit voyeur ?

— Oui, mais pas de cela seulement… tu sais, nous mettons de l’âme jusqu’en nos pires folies… il souffre, car c’est la première fois que nous nous séparons… il sent tout ce que tu prends déjà de moi, Annhine, il a peur de l’avenir, un pressentiment, il craint que je ne lui échappe… il a bien tort ! Et l’enfant renversa sa tête et se mit à rire. Je deviens courtisane pour l’a-