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de la Riviere.

leurs yeux. Ils n’ont jamais voulu que je deſcendiſſe à la porte où ils étoient, de peur que le ſoleil ne m’incommodât, & ils ne le craignoient pas pour eux ! Ils ont dit au poſtillon d’aller juſques tout près du veſtibule. Là mon grand-papa m’a reçue dans ſes bras ; & comme il ne me quittoit pas, parce qu’il me baiſoit à pluſieurs repriſes, ma grand’maman s’impatientoit, & m’arrachoit du cou de ſon mari, pour me manger les joues, & me ſerrer à ſon tour.

Lorſque nous fûmes dans le ſallon, ce fut à recommencer : je répondis à leurs careſſes & à leurs tranſports de bien bon cœur. Puis ils s’extaſierent ſur ma perſonne : Qu’elle eſt belle, ſe diſoient-ils l’un à l’autre ! qu’elle eſt grande ! que de charmes dans ſa figure ! de graces dans ſa taille ! de nobleſſe dans ſon maintien ! oh ! Mademoiſelle de Fontanges n’a jamais eu tant d’attraits. Je n’oſai leur demander qui étoit cette Demoiſelle de Fontanges ; mais je leur dis que quoique je fuſſe très-ſenſible à leurs louanges, je n’en tirerois point vanité, parce que l’amour paternel en étoit la ſource.

Mon grand-papa & ma grand’maman paſſent ſoixante ans, du moins mon grand-papa ; mais tous deux ſont encore frais & gaillards. Le reſte de la ſoirée ils me promenerent à différens endroits du château, & principalement dans le jardin, qui eſt vaſte & beau. Pendant que nous nous y promenions, ils ſaluerent un Monſieur qui