Aller au contenu

Page:Pour lire en traîneau - nouvelles entraînantes.pdf/298

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 268 —

— C’est évident, et qu’est-ce que vous avez encore à dire, vous, là-bas, lieutenant Filjup ?

— Je ne dis rien, mon colonel.

— Je ne dis rien, je ne dis rien ; j’suis pas une taupe, n… de d… ! peut-être, avec votre air de sainte nitouche. Quand vous aurez mon âge, vous n’aurez peut-être pas encore une bouillotte comme la mienne. Mais je ne me monte pas le cou, moi, je ne suis pas comme tous ces freluquets. Quand on ne peut plus plaire par la tête, on plaît par les pieds… C’est peut-être clair, n… de d… !

— Parfaitement, mon colonel.

Jusque là, le premier adjoint, celui que le colonel appelle M. le Maire, parce qu’il lui paye ses consommations, s’écrie grave et sentencieux :

Qui abonde ne vicie jamais !…

— Comment, s’écrie encore avec stupéfaction cet incorrigible Filjup, si les pieds abondent… mais alors nous parlons de quadrupèdes ?

Et le colonel furieux vient au secours de son maire-adjoint :

— Allons, lieutenant, vous raisonnez comme un tambour, comme une mazette, comme une berne, n… de d… ! C’est pourtant clair ce que dit M. le Maire : Qui abonde ne vicie pas… C’est évident ! mais la jeunesse d’aujourd’hui ne comprend rien ; bouchée, obstruée, fichue, la jeunesse d’aujourd’hui.

— Parfaitement, mon colonel.

Et la conversation continuait ainsi invariablement tous les jours, à l’heure de l’apéritif, jusqu’à