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cornme journaliste, écrivain ou homme politique, il faut interroger les gardiens-chefs, car le di recteur ne connaît jamais tous les détenus et n’a pas de rapports avec eux. Il est facile de comprendre qu’il ne peut pas en être autrement, s’il ne veut pas perdre sa légitime autorité et son indispensable prestige.

À ce point de vue, il est intéressant de donner, ici grosso modo l’emploi de la journée d’un directeur de Sainte-Pélagie, tel du moins que cela se passait autrefois car, je ne saurais trop le répéter, depuis deux ans, je ne suis plus du tout au courant de ce qui se passe dans la célèbre prison d’État.

Donc, le matin les gardiens amenaient devant le directeur les détenus qui avaient commis des infractions aux règlements pendant les dernières vingt-quatre heures. Suivaient ensuite les prévenus qui avaient demandé une audience. Ils entraient l’un après l’autre dans le cabinet du directeur et lui exposaient seul à seul leurs réclamations.

Tous les matins, venaient ainsi à l’audience de vingt à trente détenus, et pour donner une idée du tact et en même temps de la dignité nécessaire à un directeur, il est bon de rappeler ici que M. Lefébure qui était connu pour sa bonté et son esprit de justice, pendant les longues années qu’il fut directeur, n’a jamais demandé, le matin, à son audience, à un détenu pourquoi et à quel titre il était condamné. On voit par là qu’il n’y a aucune familiarité entre le directeur et les détenus,