Page:Pourtalès - Deux Contes de fées pour les grandes personnes.djvu/36

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le crépuscule. Beaucoup de personnes s’arrêtaient pour le dévisager, ce qui ne s’était jamais produit à Londres. Il s’aperçut alors que sa natte de cheveux, qui lui pendait sur le cou, accrochait l’œil des passants. Mais il ne sut pas tout de suite s’il était flatté de cette marque d’attention ou, au contraire, s’il en était blessé. Pourtant il délibéra en lui-même et, décidant qu’un vrai philosophe n’attache pas tant d’importance à un si mince ornement, se résolut à en faire le sacrifice le soir même. Tête haute, il s’en alla par un long boulevard presque entièrement bordé de cafés, si bien qu’il pensa se promener par quelque immense réfectoire public. Il avait beau changer de route, toujours s’ouvraient devant lui les semblables et lumineuses perspectives où la foule s’agglomérait autour de tables chargées de boissons.

Au bout d’un très long temps, il arriva sur une place circulaire, éclairée elle aussi par trois terrasses de cafés et, devant la porte de l’un d’eux, il vit un nègre tout galonné d’argent qui balançait son corps d’une jambe sur l’autre. Dans la nuit de son visage éclatait le sourire des dents et