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CHAPITRE PREMIER

paris sous le roi-citoyen


Cette France bourgeoise et cocardière que le jeune compositeur allemand apprenait à connaître dans les rues du Paris de 1830, était assez faite pour lui plaire. Son roi Louis-Philippe, dont elle n’a jamais été fière (peut-être parce que son visage prêtait trop à la caricature), fut pourtant l’un des princes les plus avisés et sceptiques que le monde ait produits. Il était fils de ce Philippe-Égalité qui vota la mort de Louis XVI. Jacobin de bonne benre, libéral, puis lieutenant-général à dix-huit ans, héros de la bataille de Jemmapes, on l’exila sous la Terreur. Il parcourut alors la Suisse à pied, professa la géographie, le français, le latin et les mathématiques dans un pensionnat de jeunes gens du canton des Grisons et passa ses nuits dans les bras de la cuisinière de cette institution. Cette méthode démocratique d’apprendre ls vie ne lui fut pas inutile. Il alla en Amérique ensuite, où il connut George Washington, rentra en France à la chute de Napoléon, pour être exilé en Angleterre par Louis XVIII et revenir enfin, après vingt ans de voyages, au Palais Royal, dont les salons s’ouvrirent dès lors « aux écrivains, aux artistes, aux poëtes que leur indépendance mettait en butte au mauvais vouloir de l’autorité ». La révolution de 1830 ayant éclaté, Charles X abdiqua et son cousin fut appelé à l’Hôtel de Ville où La Fayette lui remit le drapeau tricolore, symbolisant cette fois « un trône-populaire entouré d’institutions républicaines »,