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RICHARD WAGNER


fait un pas en avant, puis trois dans Olympia, et cent dans Agnès de Hohenstaufen où j’ai imaginé un emploi de l’orchestre remplaçant parfaitement l’orgue. Comment voulez-vous que quiconque puisse inventer quelque chose de nouveau, moi, Spontini, déclarant ne pouvoir surpasser en aucune façon mes œuvres précédentes ; d’autre part, étant avisé que, depuis La Vestale, il n’a pas été écrit une note qui ne fût volée à mes partitions ? Dans La Vestale j’ai composé un sujet romain ; dans Cortez, un sujet espagnol-mexicain ; dans Olympia, un sujet gréco-macédonien ; enfin, dans Agnès de Hohenstaufen, un sujet allemand : tout le reste ne vaut rien… Oh ! croyez-moi, il y avait de l’espoir pour l’Allemagne lorsque j’étais empereur de la musique, à Berlin ; mais depuis que le roi de Prusse a livré la sienne au désordre occasionné par les deux Juifs Errants qu’il a attirés, tout espoir est perdu. »

Cette allusion à Meyerbeer et à Mendelssohn fit sans doute sourire Wagner, qui garda de Spontini un souvenir particulier.



Peu de lemps après son départ, avec l’année finissante, Wagner mit le point d’orgue final à Tannhaeuser. On était au 29 décembre. Il ne lui restait qu’à en noter l’instrumentation tandis que l’intendance commandait chez Despléchin et Cie, à Paris, une décoration particulièrement soignée, Enfin, le 13 avril de 1845, il put dater et signer son œuvre complète, dont chaque page avait été lithographiée au fur et à mesure de son achèvement[1]. Prévoyance d’auteur. Mais c’était aussi une dépense de 500 thalers… Il fallut donc songer au côté pratique, c’est-à-dire aux représentations et à la propagande. Les répétitions commencèrent en automne et il y eut tout de suite quelques difficultés. Pour le rôle de Vénus, Mme Schroeder était décidément un peu trop matrone, mais il était impossible de ne pas uliliser son concours. « Au

  1. Nous avons relevé déjà art calligraphique de Wagner. Son écriture musicale était d’une telle netteté, qu’il put transcrire directement son manuscrit sur un papier lithographique spécial. L’éditeur tira aussitôt l’ouvrage à cent exemplaires, mais ce procédé ruina l’original. C’est ce qui explique qu’il n’existe aucun manuscrit de Tannhaüser.