Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome I.djvu/110

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der instamment à me parler sur les neuf heures.

« Théophé, me dit-il, vient de partir dans une voiture qui lui a été amenée par un inconnu. Elle ne s’est pas fait presser pour le suivre. Je m’y serais opposé, ajouta-t-il, si vous ne m’aviez donné des ordres précis de la laisser libre dans toutes ses volontés. »

J’interrompis ce cruel discours par une exclamation qui ne fut pas réfléchie.

« Ah ! que ne vous y opposiez-vous, m’écriai-je, et n’avez-vous pas dû comprendre le sens de mes ordres ? »

Il se hâta d’ajouter qu’il n’avait pas laissé de lui représenter son départ, que je serais surpris d’une résolution si précipitée et qu’elle me devait du moins quelque éclaircissement sur sa conduite. Elle avait répondu qu’elle ignorait elle-même à quoi elle allait s’exposer, et que de quelque malheur qu’elle fût menacée, elle prendrait soin de m’informer de son sort.

On prendra l’idée qu’on voudra des motifs qui m’échauffèrent le sang. J’ignore moi-même de quelle nature ils étaient. Mais je me levai avec des mouvements que je n’avais jamais sentis, et, renouvelant amèrement mes plaintes au maître de langues, je lui déclarai avec la même ardeur que mon amitié ou mon indignation dépendaient des efforts qu’il allait faire pour découvrir les traces de Théophé. Comme il n’ignorait point tout ce qui s’était passé depuis qu’elle