Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome I.djvu/114

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que j’avais quitté Théophé, elle l’avait fait appeler dans sa chambre, et qu’après un discours fort touchant sur sa situation, elle lui avait demandé son secours pour exécuter une résolution à laquelle elle était absolument déterminée. Ne pouvant soutenir plus longtemps, lui avait-elle dit, les regards de ceux qui connaissaient sa honte et ses infortunes, elle avait pris le parti de quitter secrètement Constantinople et de se rendre dans quelque ville d’Europe où elle pût trouver un asile dans la générosité de quelque famille chrétienne. Elle confessait qu’après les faveurs qu’elle avait reçues de moi, c’était les reconnaître mal que de se dérober sans ma participation et d’avoir manqué de confiance pour son bienfaiteur. Mais comme j’étais l’homme du monde à qui elle avait le plus d’obligation, j’étais aussi celui pour qui elle avait le plus d’estime, et par conséquent celui dont la présence, les discours et l’amitié renouvelaient le plus vivement la honte de ses aventures. Enfin les instances plutôt que ses raisons, avaient engagé le maître de langues à la conduire dès la pointe du jour, au port, où elle avait trouvé un vaisseau messinois dont elle était résolue de profiter pour se rendre en Sicile.

« Où est-elle ? interrompis-je avec une impatience encore plus vive. Voilà ce que je vous demande, et ce qu’il fallait m’apprendre tout d’un coup ?