Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome I.djvu/121

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qu’avec autant d’esprit qu’elle en avait naturellement, elle dut s’apercevoir qu’il venait de quelque autre force. Le seul changement que je mis chez le maître de langues, fut d’y laisser mon valet de chambre, sous prétexte que Théophé n’avait encore personne pour la servir ; mais au fond, pour m’assurer de toutes ses démarches, en attendant que j’eusse trouvé pour elle quelque esclave dont la fidélité pût me rendre tranquille. Je comptais de m’en procurer deux, c’est-à-dire un de chaque sexe, et de les lui mener le même soir. Condoidi me suivit chez moi. Je lui fis quitter aussitôt l’habit grec pour le vêtir plus proprement à la française. Ce changement lui fut si avantageux, que j’avais vu peu de jeunes gens d’une figure si aimable. C’étaient les mêmes traits et les mêmes yeux que ceux de Théophé, avec une taille admirable, dont son premier habit cachait tout l’agrément. Il lui manquait néanmoins mille choses qu’il aurait pu recevoir de l’éducation, et qui continuaient de me faire juger fort mal des usages et des sentiments de la noblesse grecque. Mais c’était assez de l’opinion où j’étais qu’il touchait de si près par le sang à Théophé, pour me faire apporter tous mes soins à perfectionner ses qualités naturelles. Je donnai ordre qu’il fût servi de mes domestiques avec autant d’attention que moi-même, et j’engageai dès le même jour différents maîtres pour le former dans toutes sortes