Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome I.djvu/161

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conformes à l’opinion que je m’en étais déjà formée. Aussi l’idée que j’avais commencé à prendre d’elle, et la satisfaction vertueuse que j’en avais ressentie, n’avaient-elles fait qu’augmenter pendant que j’étais attaché à l’entendre ; et pour peu qu’elle eût fait d’attention à mes mouvements, elle aurait remarqué que je recevais chaque mot qui sortait de sa bouche avec quelque joie et d’applaudissement. J’en modérai néanmoins les expressions dans ma réponse, pour ne pas donner un air de légèreté ou d’emportement à la conclusion d’une conférence si sérieuse.

« Chère Théophé ! lui dis-je dans l’abondance de mes sentiments, vous m’avez humilié par vos plaintes, et je ne vous dissimulerai point que j’étais hier fort éloigné de les prévoir ; mais j’en ai apporté quelque pressentiment dans cette visite, et je suis venu, disposé à me reconnaître coupable. Si vous me demandez comment il m’est arrivé de le devenir, c’est qu’il m’aurait été trop difficile de me persuader ce que je viens d’entendre avec une vive admiration, et ce qui me paraîtrait encore incroyable si je n’en avais des témoignages si certains. Je me reproche d’avoir eu pour vous jusqu’à présent plus d’admiration que d’estime. Eh ! quand on sait combien le goût de la vertu est rare dans les pays les plus favorisés du ciel, quand on éprouve soi-même combien son exercice est pénible, peut-on croire aisément que dans