Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome I.djvu/173

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Théophé un air de tranquillité qui semblait avoir augmenté sa fraîcheur naturelle, et qui était déjà l’effet de la satisfaction de mon cœur. Je voulus savoir de Bema quel usage elle avait fait de l’autorité que je lui avais accordée dans ma maison. Cette esclave, qui était piquée au fond d’en avoir elle-même si peu, n’osa me dire encore que sa maîtresse en eût abusé ; mais elle répéta toutes les raisons qu’elle m’avait déjà apportées pour me le faire craindre. La cause de son zèle était si visible, que je la priai en souriant d’avoir moins d’inquiétude. Elle s’était attendue, sur quelques explications de ceux qui l’avaient achetée pour moi, que je lui donnerais une espèce d’empire sur Théophé, et cette marque de confiance qu’elle avait obtenue dans quelque sérail, était le souverain degré de distinction pour une esclave. Je lui déclarai que les usages des Turcs n’étaient point une règle pour un Français, et que nous avions les nôtres, dont je lui conseillais de profiter elle-même pour la douceur de sa vie. Si elle n’eut pas la hardiesse de se plaindre, elle prit peut-être dès ce moment un dégoût pour Théophé et pour moi, dont elle ne trouva que trop aisément l’occasion de nous faire ressentir les marques.

Les affaires de mon emploi me laissant plus de liberté que je n’en avais eue depuis longtemps, je pris le prétexte de la belle saison pour faire un séjour de quelques semaines à la campagne. J’avais appréhendé