Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome I.djvu/39

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Vous serez témoin, ajouta-t-il, de la manière dont elle recevra mes adieux, car je vais la voir pour la dernière fois, et j’ai dit au Sélictar qu’il était le maître de se la faire amener quand il le jugera à propos. »

Je prévis que cette scène aurait en effet quelqu’agrément pour moi ; mais ce n’était point pour les raisons qui pouvaient la faire trouver embarrassante au Bacha.

N’ayant osé risquer un mot de réponse au billet de la jeune Grecque, je m’attendais bien qu’elle n’apprendrait point sans douleur que son esclavage allait augmenter dans le sérail du Sélictar. Que serait-ce de l’apprendre en ma présence, et de n’oser faire éclater son ressentiment par des plaintes ? L’esclave de Chériber était venu deux fois me demander ma réponse, et je m’étais contenté de lui dire que je répondrais à l’opinion qu’on avait de moi avec tout le zèle qu’on en attendait.

Au lieu de me conduire au salon, le Bacha fit avertir son esclave de venir nous joindre dans un cabinet où il donna ordre qu’on ne reçût qu’elle après nous. Sa timidité, en nous abordant, me fit connaître l’agitation de son cœur. Elle ne put me voir avec son patron, sans se flatter que j’étais entré dans ses intentions, et que je lui apportais peut-être l’heureuse nouvelle de sa liberté. Le premier compliment du Bacha dut la confirmer dans cette idée. Il lui déclara avec beaucoup de douceur et de politesse, que malgré