Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome I.djvu/60

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ser, en prenant le ciel à témoin qu’il n’avait fait que céder aux sollicitations de la dame ; qu’elle était seule coupable du vol, et qu’il n’en avait pas tiré le moindre avantage, par le malheur qu’il avait eu d’être volé si cruellement lui-même, qu’il était tombé dans le dernier excès de la misère. À la demande qu’on lui fit sur ce qu’étaient devenues la mère et la fille qu’il avait enlevées, il protesta qu’il les avait perdues toutes deux par la mort. Les seuls aveux auxquels il était forcé parurent suffisants au juge pour le condamner au supplice… J’entendis prononcer cette décision. Toute la honte que je ressentais d’être née d’un père si coupable ne m’aurait pas empêchée de faire éclater ma douleur par des cris et par des larmes. Mais ayant demandé au cadi la grâce d’être entendue un moment en secret, ce qu’il dit à ce juge parut l’adoucir, et servit du moins à faire différer l’exécution de son châtiment. Il fut conduit en prison. On augura bien d’un délai si contraire à l’usage. Pour moi, je n’eus pas d’autre parti à prendre, dans ma triste situation, que de retourner à notre logement, pour y attendre la fin d’une si cruelle aventure. Mais en approchant de la maison, j’y vis une foule de peuple, et des marques de désordre, qui me firent demander la cause de ce tumulte sans avoir la hardiesse d’avancer. Avec ce que je n’avais déjà que trop appris, on m’informa que l’usage de la ville étant de saisir les biens d’un cri-