Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome I.djvu/66

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son affection se réunissant sur moi, il ne fît plus pour mon bonheur que pour celui des dix autres. Elle s’étendit beaucoup sur l’abondance qui régnait dans sa maison. J’en devais croire le témoignage de son mari et le sien, puisqu’ils étaient employés depuis longtemps à son service, et qu’ils admiraient tous les jours les bénédictions que le Prophète avait répandues sur un si galant homme.

« Elle acheva ce tableau assez adroitement pour m’ébranler ; d’autant plus, qu’étant remplie de l’idée que j’allais lui communiquer, j’étais ravie qu’elle m’en eût épargné la peine, en me prévenant. Mais je ne trouvais dans l’amant qu’elle me proposait que la moitié de mes prétentions. Mon père m’avait toujours fait envisager l’élévation du rang avec les richesses. La qualité de négociant choqua ma fierté. Je fis cette objection à mes hôtes, qui, loin de s’y rendre, insistèrent beaucoup plus sur les avantages qu’ils m’offraient, et parurent blessés à la fin de ma résistance. Je compris que ce qu’ils avaient affecté de remettre à mon choix était déjà réglé entre eux, peut-être avec le négociant, au nom duquel ils agissaient. Je n’en fus que plus révoltée contre leurs instances ; mais, dissimulant mon chagrin, je leur demandai jusqu’au lendemain pour me déterminer. Les réflexions que je fis le reste du jour ayant augmenté mes répugnances, je pris dans le