Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome I.djvu/75

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souvenais de rien qui se fût jamais si bien accordé avec l’ordre de mes propres idées. Ce sentiment redoubla, lorsque m’apprenant le bonheur des femmes de votre nation, vous m’expliquâtes d’où il peut dépendre, et ce que les hommes font pour y contribuer. Les noms de vertu, d’honneur et de conduite, dont je n’eus pas besoin d’autre explication pour me former l’idée, s’attachèrent à mon esprit, et s’y étendirent en un moment, comme s’ils m’eussent toujours été familiers. Je prêtai l’oreille avec une avidité extrême à tout ce que l’occasion vous fit ajouter. Je ne vous interrompis point de mes questions, parce qu’il ne vous échappa rien dont je ne trouvasse aussitôt le témoignage au fond de mon cœur. Chériber vint finir une conversation si douce ; mais je n’en avais pas perdu un seul terme, et vous ne fûtes pas plutôt sorti que je commençai à m’en rappeler jusqu’aux moindres circonstances. Tout m’en était précieux. J’en fis dès ce moment mon étude continuelle. Le jour et la nuit ne me présentèrent plus d’autre objet. « Il y a donc un pays, disais-je, où l’on trouve un autre bonheur que celui de la fortune et des richesses ! Il y a des hommes qui estiment dans une femme d’autres avantages que ceux de la beauté ! Il y a pour les femmes un autre mérite à faire valoir, et d’autres biens à obtenir ! Mais comment n’ai-je jamais connu ce qui me flatte avec tant de douceur, et ce qui me semble conforme à mes incli-