Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome I.djvu/94

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plus curieux qu’elle de pénétrer le fond de cette aventure, je l’excitai à ouvrir le billet en ma présence. Il me fut plus aisé qu’à elle de le reconnaître pour une galanterie du Sélictar. Les expressions en étaient mesurées ; mais elles ne paraissaient pas moins partir d’un cœur pénétré de ses charmes. On la priait de ne rien craindre de la fortune, aussi longtemps qu’elle daignerait accepter les secours d’un homme qui n’avait rien dont elle ne pouvait disposer. En lui envoyant une somme d’argent, avec d’autres présents considérables, il ne donnait à cette générosité que le nom d’un essai léger, qu’elle le trouverait toujours prêt à redoubler. J’expliquai naturellement à Théophé de quelle main je croyais cette lettre, et j’ajoutai, pour lui donner occasion de me découvrir ses sentiments, que le Sélictar avait pour elle autant de respect que d’amour depuis qu’il ne la considérait plus comme esclave. Mais elle parut si indifférente pour ce qu’il pensait d’elle, qu’entrant furieusement dans ses idées, je remis la cassette au maître de langues pour la rendre au messager du Sélictar lorsqu’il reparaîtrait. Elle avait quelque regret d’avoir ouvert la lettre et de ne pouvoir feindre par conséquent d’ignorer ce qu’elle contenait ; mais par une seconde réflexion dont elle ne fut redevable qu’à elle-même, elle prit le parti de lui répondre. J’attendis curieusement quels termes elle allait employer, car elle ne pensa point